Rohy

La neige avait déposé un épais tapis, déjà, sur le Grand Royaume, alors que la nuit venait de déployer son plus profond voile d’ombre. Les flocons immaculés se brisaient parfois sur la forteresse de l’Ordre des Rohiriins, brutalisant la monotomie de cette fin de soirée. La communauté sous les ordres du puissant roi Rohy rentrait tout juste de la campagne contre les guerriers septentrionaux. Une victoire de plus. Le Grand Roi, comme on le surnommait, était craint et respecté de chaque individu des contrées explorées ; connu comme étant l’un des meilleurs cavaliers mais aussi épéistes du monde.

La longue journée de l’hiver de ces folles contrées venait tout juste de laisser place a son obscure rivale, ainsi, les foyers incandescents des gardes nocturnes s’éveillèrent partout dans la citadelle, éclairant celle-ci du jaune orangé des plus vifs. Alors que tout paraissait aller pour le mieux, la forêt Molleste reprenait ses droits sous le couvert de l’obscurité. Cette dernière entourait en presque totalité le château de Meunheurphord. Dans l’ombre se regroupaient les guerriers maudits Abraknydes, dont la horde était commandée par le Chef de Guerre, Mou, leur capitaine. Ils avaient reçu l’ordre d’attaquer aux premières lueurs du jour ; ainsi ils passèrent en revue leur plan d’attaque et ne nourrirent par leurs araknes. Ils n’attendaient que la venue d’un nouveau soleil, et la race des Hommes tomberait à jamais dans le néant.

Ayant joyeusement fêté leur triomphe, les hommes du roi se réveillèrent avec cette maladie passagère mais très répandue les lendemains de beuverie : la gheuldeuboat, en patois local. Atteints par cette ignoble maladie, les hommes affaiblis mirant plus d’un quart de seconde à réagir au tumulte qui les avait tous réveillés. Les Abraknydes lançaient l’assault, seuls étaient au poste les archers au poste les archers d’élites dirigés par le seigneur Drn, d’un lignée inconnue, et les mystérieux guerriers Sadida, qui avaient rejoint les rangs de Rohy après qu’il eût tranché en deux leur chef des pieds à la tête, ou le contraire d’une seule main, sans une égratignure, sans tâche et d’un coup, d’un seul.
Les guerriers impitoyables aux corps moisisse ruaient sur la forteresse de pierre, sur eux volaient déjà les flèches et les sort incroyables de leurs opposants. Une fois l’alerte sonnée et tous les défenseurs prêts à en découdre après un bon vieux sale café la bataille s’engagea vraiment, les Rohiriins positionnés tout le long de la muraille.
Sur l’ordre du commandant Drn les flèches tirées selon sa stratégie dite « allahnimp » cessèrent d’être envoyées et chaque archer dut se concentrer afin qu’au second ordre, chacun envoie une flèche enflammée, créant une volée incandescente d’une ampleur sans égal. L’ordre fut crié. Les flèches volèrent. On dit que 500 des créatures adverses au moins furent éliminées…et on renouvela l’opération.
Voyant leurs camarades partir sous formes de cendres sous le vent hivernal, les hordes abraknydes, courageuses mais pas téméraires lâchèrent les invocations que le bataillon Sadida seul s’employa à les repousser, perdant dans l’opération la moitié ses effectifs. Ce fut le « début de la fin ».

Malgré la précision, la force et l’habileté extrêmes que Drn et ses compagnons employaient, les guerriers troncs étaient trop nombreux et ne pouvaient être contenus par les seuls archers.
Forçant le passage, les Abras plongèrent d’abord dans les douves créant un pont qui fît vite tout le tour de la construction : les douves avaient disparu, la porte était sans défense. Les araknes purent grimper le long des murailles, surplombant le carnage provoqué par les flèches en contrebas , elles attaquèrent les sentinelles qui durent lâcher leurs arcs pour sortir dagues et épées. Cependant, avant d’être submergé, le capitaine archer concentra ce qui lui restait de puissance dans une flèche explosive, au beau milieu des douves. Toutefois, cet abruti oublia ce qu’était une douve : un « ron plin do », réfléchit-il plus tard, et qu’un pouvoir de feu dans l’eau ben…Malgré cela, la puissance de Drn, incroyable pour un humain normal, titanesque même, fit que l’explosion eût tout de même lieu, mais sous l’eau créant un cratère existant encore de nos jours. La légende veut que 101 Abraknydes périrent d’une unique attaque, Drn gagna ce jour son surnom de Fléau des Arbres, et est encore respecté pour cela de nos jours :
« Vla un jolhy ta d’boa , s’tomb bien cé livère ! » s’enhardit-il.
L’afflux d’arbres se fit tout de même plus important sans archers pour tout casser, la porte finit par céder. Les Sadidas y passèrent. Les Iop aussi. Et quand les archers en eurent fini avec les araignées, sbires de l’adversaire, il était trop tard pour saisir à nouveau les arcs puisque l’ennemi était déjà parvenu en haut des escaliers, cherchant en même temps à percer l’entrée du bastion où se réfugiait encore le Roi et une poignée d’étranges créatures rencontrées précédemment ayant la capacité incroyable de soigner les combattants.
La porte de la cachette de Rohy ne céda pas. Il l’ouvrit, alors que les Cras s’étaient regroupés devant-elle, celle-ci était l’un des principaux endroits du château où une importante poche de résistance existait encore. Rohy vit alors que nul guerrier ne résistait longtemps face aux hordes de Mou. Il utilisa alors son légendaire « Souffle Divin », un sort que son épée concevait, d’une puissance phénoménale, et chaque Abraknydes présent dans l’enceinte du château alla se briser sur le mur le plus proche, comme par magie, brûlés au 69°degré. Drn, concevant en tant que fin tacticien que l’ennemi reviendrait vite, après avoir constaté « Sa fé lménaj », proposa à Rohy de « stiré vith fé, y von reviendr ». « Néni ! » répondit l’autre, « meilleure mort glorieuse ici avec ma forteresse et mes compagnons de bataille qu’une fuite couarde. Vous mon cher, prendrez tous les hommes dont vous jugerez qu’ils sont forts et perpétuerez les traditions et la mémoire de l’Ordre à tout jamais, après avoir emprunté la porte de derrière et filé à l’Anglaise ». « Alla koi ? », fit l’autre. « Je ne sais guère pourquoi je ne formulai cette phrase mon ami, oubliez la veuillez vous ? Allez filez rassembler vos hommes et laissez moi mourir. Adieu camarade », finit-il. « Oké patron, jtémé bien kan mhem, sa mfé chié un pe… » puis le tout-puissant Cra prit la poudre d’escampette.

La dernière volonté du Grand Rohy fut respectée, et l’est de nos jours, bien que le nombre, déjà peu élevé de membres à la base, diminue au fil des déconnections, heu mois…

Chapitre 18, Tome VII du grand livre des histoires du Grand Roi selon Drn, le fléau des arbres, par Lemenestrel